La Shri Ram Chandra Mission n'est pas la seule organisation à proposer des méthodes de méditation. La transmission dont elle est si fière se traduit souvent par un asservissement qui fait perdre tout repère et isole inéluctablement l'individu de son environnement.
La Shri Ram Chandra Mission a été classée comme secte dans un rapport parlementaire français. Avant d'adhérer, informez vous !

439 articles – 3449 commentaires – Dernier ajout le 9/09/2017

“Take criticism seriously, without anger or sadness. Use it for correcting yourself, and welcome it.”
Kamlesh Patel (1/04/2015)

14 mars 2011

Chari et la psychologie des foules

ENGLISH TRANSLATION

Il me semble avoir déjà fait cette analogie avec la drogue. Mais la remarque de Léa sur la psychologie sociale me fait penser à autre chose. J’ai déjà dit tout le mal que je pensais de la pensée tronquée de nos amis sociologues qui n’envisagent les sectes que sous l’angle de nouveaux mouvements religieux et ce qu’ils apportent à notre société, sans se préoccuper de leur organisation interne.
Il est une discipline scientifique, déjà assez ancienne, qui s’est spécialement intéressé à la relation groupe-leader, c’est la psychologie des foules de Gustave Lebon et de ses successeurs, tel Serge Moscovici.
A l’inverse de l’individu, la foule y est présentée assez négativement. Irrationnelle et versatile, l’âme des foules est de nature psychopathologique et soumise à des croyances par nature dogmatiques et utopiques. Elle n’a de cesse de se chercher une idole et des boucs émissaires.
Dans cette théorie scientifique, le meneur lui donne un but (idéal), soude le groupe et organise son action. Toutes les explications de ce phénomène d’influence du leader sur la foule ont recours au mécanisme de la suggestion. Lebon parle du prestige du meneur et de son hypnose de la foule. Gabriel Tarde parle de suggestion de la part du leader et d’imitation par la foule qui l’admire, en quête d’un modèle. Freud l’explique à l’aide des hypothèses psychanalytiques, par le principe d’identification, dans une composante amoureuse la foule déracinée recompose la figure du père. Weber parle de charisme du meneur.

Gustave Lebon – Psychologie des foules, 1905 (Formes religieuses que revêtent toutes les convictions des foules, pp. 45-48) - Extraits :

« Nous avons montré que les foules ne raisonnent pas, qu'elles admettent ou rejettent les idées en bloc ; ne supportent ni discussion, ni contradiction, et que les suggestions agissant sur elles envahissent entièrement le champ de leur entendement et tendent aussitôt à se transformer en actes. Nous avons montré que les foules convenablement suggestionnées sont prêtes à se sacrifier pour l'idéal qui leur a été suggéré. Nous avons vu aussi qu'elles ne connaissent que les sentiments violents et extrêmes, que, chez elles, la sympathie devient vite adoration, et qu'à peine née l'antipathie se transforme en haine. (…)
Quand on examine de près les convictions des foules, aussi bien aux époques de foi que dans les grands soulèvements politiques, tels que ceux du dernier siècle, on constate, que ces convictions revêtent toujours une forme spéciale, que je ne puis pas mieux déterminer qu'en lui donnant le nom de sentiment religieux.
Ce sentiment a des caractéristiques très simples : adoration d'un être supposé supérieur, crainte de la puissance magique qu'on lui suppose, soumission aveugle à ses commandements, impossibilité de discuter ses dogmes, désir de les répandre, tendance à considérer comme ennemis tous ceux qui ne les admettent pas. Qu'un tel sentiment s'applique à un Dieu invisible, à une idole de pierre ou de bois, à un héros ou à une idée politique, du moment qu'il présente les caractéristiques précédentes il reste toujours d'essence religieuse. Le surnaturel et le miraculeux s'y retrouvent au même degré. Inconsciemment les foules revêtent d'une puissance mystérieuse la formule politique ou le chef victorieux qui pour le moment les fanatise.
On n'est pas religieux seulement quand on adore une divinité, mais quand on met toutes les ressources de l'esprit, toutes les soumissions de la volonté, toutes les ardeurs du fanatisme au service d'une cause ou d'un être qui devient le but et le guide des pensées et des actions.
L'intolérance et le fanatisme constituent l'accompagnement nécessaire d'un sentiment religieux. Ils sont inévitables chez ceux qui croient posséder le secret du bonheur terrestre ou éternel. (…)
Les convictions des foules revêtent ces caractères de soumission aveugle, d'intolérance farouche, de besoin de propagande violente qui sont inhérents au sentiment religieux ; et c'est pourquoi on peut dire que toutes leurs croyances ont une forme religieuse. Le héros que la foule acclame est véritablement un dieu pour elle. Napoléon le fut pendant quinze ans, et jamais divinité n'eut de plus parfaits adorateurs. Aucune n'envoya plus facilement les hommes à la mort. Les dieux du paganisme et du christianisme n'exercèrent jamais un empire plus absolu sur les âmes qu'ils avaient conquises.
Tous les fondateurs de croyances religieuses ou politiques ne les ont fondées que parce qu'ils ont su imposer aux foules ces sentiments de fanatisme qui font que l'homme trouve son bonheur dans l'adoration et l'obéissance et est prêt à donner sa vie pour son idole. (…)
Aujourd'hui la plupart des grands conquérants d'âmes n'ont plus d'autels, mais ils ont des statues ou des images, et le culte qu'on leur rend n'est pas notablement différent de celui qu'on leur rendait jadis. On n'arrive à comprendre un peu la philosophie de l'histoire que quand on est bien pénétré de ce point fondamental de la psychologie des foules. Il faut être dieu pour elles ou ne rien être. (…)
Aussi est-ce une bien inutile banalité de répéter qu'il faut une religion aux foules, puisque toutes les croyances politiques, divines et sociales ne s'établissent chez elles qu'à la condition de revêtir toujours la forme religieuse, qui les met à l'abri de la discussion. L'athéisme, s'il était possible de le faire accepter aux foules, aurait toute l'ardeur intolérante d'un sentiment religieux, et, dans ses formes extérieures, deviendrait bientôt un culte. »

Serge Moscovici – L’âge des foules, 1985 (Les religions profanes, pp. 467-476) - Extraits :
(Moscovici traite ici essentiellement des partis politiques et s’appuie notamment sur l’exemple du parti communiste russe, ce qu’il appelle une religion profane).

« Jusqu'ici, nous avons envisagé les meneurs pour autant qu'ils ont un charisme. Nous les avons définis comme la réunion de deux personnages en un seul : ombre portée du père fondateur et du fils héroïque. Mais ces ombres sont attachées à une doctrine, à un but qu'elles se sont fixé pour mission de réaliser. (…)
D'autre part, la psychologie des masses nous a appris que les meneurs ne peuvent accomplir leur mission sans recruter des individus momentanément détachés de leur groupe habituel. Ceux-ci forment l'embryon d'une foule. Ils subissent l'ascendant d'un chef qui transforme leur rencontre en une organisation stable. L'Église et l'armée, ce fut l'audace d'un Tarde et surtout d'un Freud de le reconnaître, sont le modèle de toute foule de cette nature. Le parti est la traduction de l'une et de l'autre dans une société comme la nôtre qui ne régit plus la tradition familiale, locale et aristocratique. En un mot, les partis sont à la fois les Églises et les armées de l'âge des foules. (…)
Le caractère commun à toutes ces foules artificielles, la preuve de leur bonne santé, demeure toujours et partout un système de croyances. Il les cimente, les tient ensemble et leur permet de mobiliser les hommes jusqu'à leur demander le sacrifice de leur vie. Un meneur ne saurait fonder et diriger un tel parti, nécessaire à sa tâche, s'il ne possède pas un tel système. Car les masses n'agissent que mues par une croyance - et les croyances n'existent que par les masses. Le prophète est devenu l'archétype du leader contemporain précisément pour cette raison : il faut qu'il suscite une foi robuste autour de lui.
Or l'exemple et la forme la plus achevée d'un système de croyances est la religion. (…)
Elles comportent un dogme, des textes sacrés auxquels on obéit, des héros ayant qualité de saints.
De plus, une telle religion profane répond strictement à certaines nécessités psychiques - le besoin de certitude, la régression des individus dans la masse, etc. - et à rien d'autre. (…)
Examinons de plus près une telle religion, en laissant de côté ses manifestations spectaculaires, que nous avons déjà décrites. Quelles en sont les fonctions ? La toute première est de composer une vision totale du monde, qui pallie le caractère fragmentaire et divisé de chaque science, de chaque technique et de l'a connaissance en général. Il existe, dans le tréfonds de la nature humaine, un besoin élémentaire d'harmoniser, au sein d'un ensemble parfait, tout ce qui, dans notre expérience, nous semble incompatible et inexplicable. Lorsque nous ne possédons plus de principes simples, de modèle unique pour expliquer ce qui se passe en nous et autour de nous, nous nous sentons menacés. Pire : réduits à l'impuissance, en face de la diversité des forces économiques, des problèmes psychiques et de la masse des événements incontrôlés. Ce défaut de cohérence nous empêche de participer à une action sociale définissable. Il n'y a ni ordre ni sécurité possible pour les individus dans une société où le nombre de questions excède le nombre de réponses. (…)
Certes le savant ou le technicien peuvent s'accommoder de ce morcellement, accepter l'oscillation perpétuelle entre des solutions contradictoires et l'incertitude des vérités éphémères. Mais l'homme, dans sa vie ordinaire, le rejette. Il est avide de certitudes solides, de vérités immuables. (…)
Par essence, les religions profanes lui fournissent une telle vision totale. Elles offrent une conception du monde où chaque problème rencontre sa solution. (…)
Toutes les religions sacrées proposent une conception du monde physique. Elles expliquent l'origine de l'univers et prévoient son avenir. Par contre les religions profanes se constituent autour d'une vision du monde social. (…)
Seules les religions (et leurs partis missionnaires) peuvent encore susciter de tels attachements. Elles amènent les individus à accepter dans leur for intérieur ce que la collectivité exige d'eux. (…)
Les religions reconnaissent l'aspiration au bonheur, le besoin de protection que les hommes éprouvent depuis l'enfance. Après avoir peint sous les couleurs les plus sombres les forces qui les menacent, elles proposent une solution. (…)
Ce sont donc des religions de l'espoir. Elles garantissent aux hommes qu'ils sortiront victorieux de la tourmente et définitivement, à condition de s'identifier avec l'idéal qui les dépasse et de respecter les prescriptions qu'elles édictent.
(…) dissimuler un mystère. Chaque religion a le sien. En son nom elle impose des règles et proclame des vérités sur lesquelles elle ne s'explique pas. Au contraire, elle jette sur leurs raisons des ombres épaisses et les dissimule de façon que nul ne les aperçoive. Tout est mis en oeuvre pour éviter un contact fortuit. Tout concourt à empêcher la révélation du secret ainsi dérobé à la vue du public des fidèles. Ce secret se présente tantôt comme une chose bénéfique, tantôt comme une chose maléfique. (…)
On peut affirmer que la plupart des foules artificielles - armées, Églises, partis - sont en rapport avec un tel mystère. Elles possèdent un ensemble de cérémonies, d'emblèmes, de mots de passe (songez aux francs-maçons !) qui le protègent et censurent toute tentative de le découvrir. Il sert à justifier la hiérarchie. L'individu qui en gravit les échelons s'approche de ce point sacré, les autres demeurent à distance. (…)
Les religions sont l'oeuvre des « fils », des successeurs du père fondateur d'un peuple ou d'une société déterminée. Elles les disculpent et les légitiment à la fois, en dissimulant leur crime au point que personne ne voit plus en eux ses auteurs. (…) »

Le phénomène sectaire, la Shri Ram Chandra Mission de Chari peuvent être examinés à l’aide des éléments que nous fournit cette discipline à la frontière entre psychologie et sociologie :
Adoration d'un être supposé supérieur, crainte de la puissance magique qu'on lui suppose, soumission aveugle à ses commandements, impossibilité de discuter ses dogmes, désir de les répandre, tendance à considérer comme ennemis tous ceux qui ne les admettent pas, besoin de certitude, régression des individus dans la masse, soumission de la volonté, ardeur du fanatisme au service d'une cause ou d'un être qui devient le but et le guide des pensées et des actions… inévitables chez ceux qui croient posséder le secret du bonheur terrestre ou éternel.
Tous les fondateurs de croyances religieuses ont su imposer aux foules ces sentiments de fanatisme qui font que l'homme trouve son bonheur dans l'adoration et l'obéissance et est prêt à donner sa vie pour son idole.
Les meneurs ne peuvent accomplir leur mission sans recruter des individus momentanément détachés de leur groupe habituel. Le prophète est devenu l'archétype du leader contemporain, il doit susciter une foi robuste autour de lui.

Alexis

3 commentaires:

4d-Don a dit…

Alexis...

C'est interessant que le adeptes du Sahaj Marg(tm) ont maintenant leurs "Soldats Spirituels" tout comme les Chrétiens, les Juifs, les Musulmans, et même les Bouddhistes (Shaolin)... Alors ils sont RELIGION et Armée qui sont leurs "missionaires". Et ils disent encore de pas faire de prosélytisme.

Alors, quoi de nouveau?

Avec Chari, Le Sahaj Marg(tm) est plutôt Spiritualisme, avec des égrégores, des Médiums, des messages parvenant des esprits (êtres de lumière) et des humains qui sont morts.

Ce n'est pas seulement de la RELIGION mais ça devient une religion ridicule; un mélange de NEW AGE, de Spiritualisme, avec de la méditation et des prières(pour la paix, pour un égrégore favorable, et ??, mais pas pour le CIDA ... lol lol ), et des rituels, des parties (de fête), etc...

Il ne faut pas oublier le côté nationaliste et impérialiste (la Diaspora) de la SRCM(California-1997) de Chari, d'ou vient un gros pourcentage de l'argent. On connait déja des donations d'un million de dollars (suivit par un photo de Chari en "blue jeans", et d'un Ashram tout au complet ... que j'appele le "Battle Star Galactica", d'ou sortent les nouveaux graduée "Soldats Spirituels"... Les cadets de l'espace (à la Sahaj Marg(tm))

Le Monsieur qui en a fait cadeaux a Chari est maintenant "precepteur" !!

J'en ai fait un article sur mon Blog. (avec photo)

http://4d-don.blogspot.com/2011/01/sahaj-marg-tm-and-their-soldiers-of.html

Don

Alexis a dit…

@ 4d

L’esprit guerrier de la SRCM ne fait pas de doute :
Juste avant le discours de Chari “Soldiers of Spirituality” du 20 avril 2004, il y avait eu une formation à Hyderabad le 4 avril 2004,où le ZIC était comparé au général, le CIC à un "field commander" :
"Strategy formulation. The zone-in-charge is like a General, in charge of a territory. He has to evolve a strategy for effective penetration of his territory. He has to communicate this strategy to all the centres-in-charge, and convince them of its efficacy. He has to evolve a tactical plan to make this work (…) Tactical plan. The zone-in-charge has to plan where and how to grow the Mission. He has to device the means to achieve this growth. He has to train the functionaries in his zone to undertake this task. He has to monitor this activity and make corrections where necessary. He has to conduct annual reviews of this plan, and send a progress report to Chennai.”
Depuis toujours, le Sahaj Marg entretient les analogies entre son prosélytisme débridé et la guerre de conquête religieuse, telle une croisade ou un jihad spirituels ! ce n’est pas nouveau…

Spiritualité, spiritualisme et spiritisme s’entremêlent :
Oui, au cours des années 2000, Chari a fait prendre un tour très spiritualiste à la SRCM. L’ennemi de Chari, son bouc émissaire, apparaît clairement dans ses discours aujourd’hui, ce sont les religions traditionnelles. Babuji a vendu de la spiritualité, le Sahaj Marg. Chari a commencé par l’imiter, mais en accentuant ses propos sur les outils et la méthode. Ce qui a eu pour conséquence de ritualiser le Sahaj Marg, ce qui l’a rapproché à mains égards d’une religion avec son dogme et ses prêtres, les précepteurs. Mais le grand tournant est apparu en 2005 avec la vente de Whispers. D’abord envisagé comme une pompe à fric, cela a vulgarisé le médium et le "Brighter world" spiritualiste et spirite. Les délires d’égrégore, d’enfants indigos, etc etc. nous amènent aujourd’hui à définir le Sahaj Marg TM actuel comme un pauvre mouvement new age de bas étage, pratiquant le spiritisme et surfant sur la peur de l’apocalypse…

Je reste plus circonspect sur l’aspect nationaliste de la SRCM et de Chari… mais je me trompe peut-être !

Alexis a dit…

Toujours d'actualité

En ces temps difficiles pour nos amis japonais, un bref rappel du Discours de Chari du 1er janvier 2006 ,suite au précédent tsunami qui toucha les cotes indiennes, et mon commentaire d'alors.

Extraits de "The art of listening to Nature":
"(…) Et quand nous chargeons la Terre de notre grossièreté, et qu'elle s'accumule, la Nature veut rejeter toute cette grossièreté ; et vous avez des manifestations comme les tremblements de terre, le tsunami que nous avons eu il y a quelques jours (…) Alors frères et sœurs, tout dépend de vous (…) Tout ce que vous faites, bon ou mauvais, agit sur l'univers entier. Dans cette conscience, si vous continuez à travailler et à lutter dans votre vie spirituelle, le monde deviendra automatiquement une meilleure place."

Bref, le tsunami [de 2005] est de notre faute, et si nous méditons davantage il n'y en aura plus. Alors retournons méditer pendant que les autres agonisent. La religion chrétienne promettait le paradis après la mort, à défaut de le promettre sur terre, y légitimant ainsi tous les abus. Le Sahaj Marg aide à vivre dans une société très imparfaite, en substituant à la révolte légitime face au monde extérieur une pseudo solution intérieure. Se changer soi devient plus important que de changer ou améliorer le monde. Sans le dire, le Sahaj Marg aide à sa façon à légitimer tous les abus de notre monde. La religion était l'opium du peuple, le Sahaj Marg et Rajagopalachari le sont aussi.